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Charles Perrault - Les souhaits ridicules - Conte

Contes de Charles PERRAULT (1628-1703)

Les souhaits ridicules

Si vous étiez moins raisonnable.
Je me garderais bien de venir vous conter
La folle et peu galante fable
Que je m'en vais vous débiter.
Une aune de boudin en fournit la matière.
"Une aune de boudin, ma chère !
Quelle pitié ! c'est une horreur !", .
S'écriait une précieuse,
Qui, toujours tendre et sérieuse,
Ne veut ouïr parler que d'affaires de coeur.
Mais vous qui mieux qu'âme qui vive
Savez charmer en racontant,
Et dont l'expression est toujours si naïve,
Que l'on croit voir ce qu'on entend;
Qui savez que c'est la manière

Dont quelque chose est inventé,
Qui beaucoup plus que la matière
De tout récit fait la beauté.
Vous aimerez ma fable et sa moralité;
J'en ai, j'ose le dire, une assurance entière.

Il était une fois un pauvre bûcheron
Qui las de sa pénible vie,
Avait, disait-il, grande envie
De s'aller reposer aux bords de l'Achéron;
Représentant, dans sa douleur profonde,
Que depuis qu'il était au monde,
Le Ciel cruel n'avait jamais
Voulu remplir un seul de ses souhaits.

Un jour que, dans le bois, il se mit à se plaindre,
A lui, la foudre en main, Jupiter s'apparut.
On aurait peine à bien dépeindre
La peur que le bonhomme en eut :
"Je ne veux rien, dit-il, en se jetant par terre,
Point de souhaits, point de Tonnerre,
Seigneur, demeurons but à but.

-- Cesse d'avoir aucune crainte :
Je viens, dit Jupiter, touché de ta complainte,
Te faire voir le tort que tu me fais.
Ecoute donc : je te promets,
Moi qui du monde entier suis le souverain maître,
D'exaucer pleinement les trois premiers souhaits
Que tu voudras former sur quoi que ce puisse être.
Vois ce qui peut te rendre heureux.
Vois ce qui peut te satisfaire;
Et comme ton bonheur dépend tout de tes voeux,
Songes-y bien avant que de les faire."

A ces mots Jupiter dans les cieux remonta,
Et le gai bûcheron, embrassant sa falourde,
Pour retourner chez lui sur son dos la jeta.
Cette charge jamais ne lui parut moins lourde.
"Il ne faut pas, disait-il en trottant,
Dans tout ceci, rien faire à la légère;
Il faut, le cas est important,
En prendre avis de notre ménagère.
Çà dit-il, en entrant sous son toit de fougère,
Faisons, Fanchon, grand feu, grand chère,
Nous sommes riches à jamais,
Et nous n'avons qu'à faire des souhaits."
Là-dessus tout au long le fait il lui raconte.
A ce récit, l'épouse vive et prompte
Forma dans son esprit mille vastes projets;
Mais considérant l'importance
De s'y conduire avec prudence :
"Blaise, mon cher ami, dit-elle à son époux,
Ne gâtons rien par notre impatience;
Examinons bien entre nous
Ce qu'il faut faire en pareille occurrence;
Remettons à demain notre premier souhait
Et consultons notre chevet.

-- Je l'entends bien ainsi, dit le bonhomme Blaise.
Mais va tirer du vin derrière ces fagots."
A son retour il but, et goûtant à son aise
Près d'un grand feu la douceur du repos,
Il dit, en s'appuyant sur le dos de sa chaise :
"Pendant que nous avons une si bonne braise,
Qu'une aune de boudin viendrait bien à propos !"
A peine acheva-t-il de prononcer ces mots,
Que sa femme aperçut, grandement étonnée,
Un boudin fort long, qui partant
D'un des coins de la cheminée,
S'approchait d'elle en serpentant.
Elle fit un cri dans l'instant;
Mais jugeant que cette aventure
Avait pour cause le souhait
Que par bêtise toute pure
Son homme imprudent avait fait,
Il n'est point de pouille et d'injure
Que de dépit et de courroux
Elle ne dit au pauvre époux.
"Quand on peut, disait-elle, obtenir un empire,
De l'or, des perles, des rubis,
Des diamants, de beaux habits,
Est-ce alors du boudin qu'il faut que l'on désire ?
-- Hé bien, j'ai tort, dit-il, j'ai mal placé mon choix,
J'ai commis une faute énorme,
Je ferai mieux une autre fois.
-- Bon, bon, dit-elle, attendez-moi sous l'orme,
Pour faire un tel souhait, il faut être bien boeuf !"
L'époux plus d'une fois, emporté de colère,
Pensa faire tout bas le souhait d'être veuf,
Et peut-être, entre nous, ne pouvait-il mieux faire :
"Les hommes, disait-il, pour souffrir sont bien nés !
Peste soit du boudin et du boudin encore;
Plût à Dieu, maudite pécore,
Qu'il te pendît au bout du nez !"

La prière aussitôt du Ciel fut écoutée,
Et dès que le mari la parole lâcha,
Au nez de l'épouse irritée
L'aune de boudin s'attacha.
Ce prodige imprévu grandement le fâcha.
Fanchon était jolie, elle avait bonne grâce,
Et pour dire sans fard la vérité du fait,
Cet ornement en cette place
Ne faisait pas un bon effet;
Si ce n'est qu'en pendant sur le bas du visage,
Il l'empêchait de parler aisément.
Pour un époux merveilleux avantage,
Et si grand qu'il pensa dans cet heureux moment
Ne souhaiter rien davantage.
"Je pourrais bien, disait-il à part soi,
Après un malheur si funeste,
Avec le souhait qui me reste,
Tout d'un plein saut me faire roi.
Rien n'égale, il est vrai, la grandeur souveraine;
Mais encore faut-il songer
Comment serait faite la reine,
Et dans quelle douleur ce serait la plonger
De l'aller placer sur un trône
Avec un nez plus long qu'une aune.
Il faut l'écouter sur cela,
Et qu'elle-même elle soit la maîtresse
De devenir une grande Princesse
En conservant l'horrible nez qu'elle a,
Ou de demeurer Bûcheronne
Avec un nez comme une autre personne,
Et tel qu'elle l'avait avant ce malheur-là."

La chose bien examinée,
Quoiqu'elle sût d'un sceptre et la force et l'effet,
Et que, quand on est couronnée,
On a toujours le nez bien fait;
Comme au désir de plaire il n'est rien qui ne cède,
Elle aima mieux garder son bavolet
Que d'être reine et d'être laide.

Ainsi le bûcheron ne changea point d'état,
Ne devint point grand potentat,
D'écus ne remplit point sa bourse :
Trop heureux d'employer le souhait qui restait,
Faible bonheur, pauvre ressource,
A remettre sa femme en l'état qu'elle était.

Bien est donc vrai qu'aux hommes misérables,
Aveugles, imprudents, inquiets, variables,
Pas n'appartient de faire des souhaits,
Et que peu d'entre eux sont capables
De bien user des dons que le Ciel leur a faits.

 

Commentaires de Collin de Plancy - 1826.

L'origine des Souhaits Ridicules est un vieux conte populaire , qui se trouve dans le recueil des Excellens traits de vérité, de Philippe d'Alcrippe, seigneur de Néri en Verbos. On en pourrait citer diverses leçons. Comme celle de Philippe d'Alcrippe est un peu sale, nous le raconterons simplement, selon les meilleures versions des bonnes femmes du pays. C'est le conte des Trois Jeunes Fées,
On montre, dans la forêt de Lions , une petite grotte qu'on nomme la grotte des Fées ; c'est le sujet de mille histoires merveilleuses. Aux tems où les bêtes parlaient, où les sorciers avaient le pouvoir de faire venir le diable, Variante.
Ainsi que Blaise , tous les hommes
Se plaignent de leur sort, et forment des souhaits ;
Songeons plutôt, songeons, imprudens que nous sommes,
A bien user des dons que le ciel nous a faits.
où les fées se montraient communément aux hommes, trois jeunes frères du pays de Caux passèrent un jour d'été, un peu avant minuit, dans la forêt de Lions. Lorsqu'ils furent arrivés devant la grotte des Fées, ils aperçurent trois jeunes fées, qui coururent à eux; elles étaient extrêmement jolies, vives, gracieuses, vêtues avec beaucoup d'élégance, et venaient de la cour du roi Oberon, qui était, comme vous savez, roi des fées.
Les trois belles fées prièrent les trois Cauchois de danser avec elles quelques contredanses, au clair de la lune, ce qui fit grand plaisir aux jeunes gens. Quoiqu'ils fussent un peu fatigués de leur route, ils se piquaient tellement de politesse pour les dames, qu'ils dansèrent jusqu'au lever du soleil. Ils étaient tous trois, à la vérité, tellement séduits par les jeunes attraits des trois fées, qu'ils auraient volontiers passé leur vie auprès d'elles.
Mais, au matin, il fallut les quitter pour jamais; l'une d'elles leur dit : « Mes bons amis, pour vous récompenser du tems que nous vous avons fait perdre, et du plaisir que vous nous avez donné, nous vous faisons un don : c'est que le premier souhait que chacun de vous formera, s'accomplira sur-le-champ. »
Après ces paroles, les trois fées disparurent, et les jeunes Normands se remirent en roule, eu songeant aux choses qu'ils pouvaient souhaiter. « Pour moi, dit l'aîné, je ne désire rien; j'ai assez de fortune, Dieu merci, puisque, selon l'usage de notre pays de Caux, je dois hériter de tous les biens, en vertu de mon droit d'aînesse ; mais vous, mes frères, cherchez à vous enrichir.
— » Nous le ferons certainement, dirent les deux puîmés, ce ne sera toutefois qu'après vous, qui êtes notre aîné; si vous êtes assez riche, souhaitez quelques honneurs.
- Eh bien ! tout ce que je demande, dit l'aîné, c'est qae notre veau guérisse de la colique les personnes qui le tiendront par la queue. » Cette demande fut accordée à l'heure même, et tant que le veau reçut il n'y eut plus de colique dans le pays.
— «Vous êtes un grand sot, reprit le plus jetme, de perdre ainsi le pouvoir de devenir on grand seigneur; moi, je voudrais que les cornes du veau et de la vache fassent plantées sur votre front. » Aussitôt deux grandes et deux petites cornes se fixèrent sur la tête du frère aîné.
L'autre frère, qui n'avait pas encore souhaité , se mit en colère contre le plus jeune, et lui dit : « N es-tu pas plus sot encore que notre aîné ? vois l'état où tu le mets ; puisses-tu, toi, avoir une tête de boeuf sur tes épaules! Incontinent la tête du jeune homme s'allongea, et prit la forme qu'on lui avait souhaitée......
Les trois frères, désolés de l'imprudence avec laquelle ils venaient d'agir, allaient faire l'objet de la risée publique , si les jeunes fées n'eussent en pitié d'eux ; celle qui leur avait fait le don, apparut : « Vous voyez., leur dit-elle, que les hommes ne savent ce qu'ils veulent. » Elle reprit ses souhaits, débarrassa leurs têtes ; il n'y est que le veau qui conserva son privilège.
Voilà le conte populaire : on a vu de quelle manière Perrault l'a embelli. Ce sujet bizarre a été l'objet de plusieurs imitations. On l'a aussi quelquefois mis a la scène. Le Bûcheron de Sailerne, ou les Souhaits, vaudeville de MM. Désaugiers et Gentil, représenté, en 1814, aux Variétés, s'éloigne assez du conte de Perrault. Trois fées donnent au bûcheron Pervonte le don de souhaiter. Il souhaite, par exemple, que son fagot lui serve de cheval, et il revient à cheval sur son fagot . Il finit par épouser la princesse Rosafiera.
Mais le Bûcheron, ou les Trois Souhaits, comédie, mêlée d'ariettes, de Guichard et Philidor, jouée aux Italiens, en 1763, est due plus évidemment aux Souhaits Ridicules , dont on eut pu tirer meilleur parti. Biaise revient de la forêt ; Mercure, sur un nuage, lui annonce que Jupiter, touché de ses maux, remplira les trois premiers souhaits qu'il pourra former. Biaise, agréablement surpris, mais embarrassé, va consulter le bailli, avec qui il se met à table. Il offre au bailli une friture de petits poissons ; mais, sachant qu'il aime l'anguille, il voudrait pouvoir lui en offrir une : aussitôt une anguille paraît sur la table. Margot , furieuse de la balourdise de son mari, l'accable d'injures. Biaise, impatienté, voudrait qu'elle fût muette ; ce qui ne manque pas de s'accomplir. Enfin, le pauvre homme, désenchanté, veut bien faire le sacrifice de son dernier souhait, pour rendre la parole à sa femme, a condition qu'elle consentira au mariage de sa fille Suzette avec Colin. Margot se rend, recouvre la voix, et se console, par un débordement de paroles, du désagrément d'avoir été quelques instants muette.

 

 


Date de création : 11/08/2012 @ 20:59
Dernière modification : 12/08/2012 @ 13:30
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